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Extrait des Registres du Conseil d'État du Roy. LE ROI étant informé qu'il existe toujours des contestations
entre les auteurs Dramatiques et les Comédiens français, quoiqu'une partie
de leurs discussions ait été terminée à l'amiable par un accord signé des
Comédiens le 11. mars d[erni]er, approuvé le 31. du même mois par les premiers
Gentilshommes de la chambre de Sa Majesté et signé par les Auteurs le 7.
mai suivant, et qu'il soit d'ailleurs intervenu le 17. mars et 12. mai d[erni]ers
deux arrêts qui semblaient devoir finir toutes les autres difficultés, Sa
Majesté a jugé indispensable de se faire rendre compte dans le plus grand
détail des différents mémoires contenant les représentations des Comédiens et
celles des Auteurs, et de prononcer définitivement par des dispositions si
claires et si précises qu'il ne puisse désormais rester aucune doute sur ses
véritables intentions. A quoi voulant pouvoir: oui le rapport, Le Roi
étant en son Conseil, a ordonné et ordonne ce qui suit:
Article 1er. Toutes les réceptions faites jusqu'à ce jour par la Comédie de pièces
non encore jouées seront regardées comme nulles et non reçues. Pourront
néanmoins les Auteurs des d[ites] pièces les présenter de nouveau à la lecture.
Veut et entend Sa Majesté que, lors de ces nouvelles lectures, les Comédiens
ayent des égards pour les Auteurs déjà connus au théâtre par de bons
ouvrages. Les pièces qui seront reçues au nouvel éxamen conserveront entre
elles le rang d'ancienneté qu'elles avaient auparavant, et les Auteurs dont les
pièces seront refusées achèveront le temps de leurs entrées, comme leur ayant
été acquises par la réception cy-devant faite.
Art. 2. Pour prévenir par la suite tous abus dans la réception, soit des pièces
Chapter 1 Page 2nouvelles, soit de celles dont la prémiere récéption annullée par le précédent
article, Veut Sa Majesté qu'elles soyent lues devant les neuf personnes de la
Comédie qui composeront le Comité établi par autre arrêt de ce jour, et devant
quatre autres personnes de la Comédie dont deux seront choisies par l'auteur de
la pièce qu'il sera question de lire, ou par celui qui la présentera à sa place,
et deux seront choisies par le Comité, de manière qu'il y ait toujours treize
examinateurs qui assistent à la lecture d'une pièce, et qui jugent si elle doit être
admise ou refusée, ou renvoyée à correction, Lesquels examinateurs seront tenus
de se conformer aux règlements observés pour les lectures et réceptions des pièces.
Art. 3. L'auteur, ou celui qui présentera la pièce à sa place, pourra, s'il
le juge à propos, choisir dans le nombre des examinateurs celui qu'il
voudra charger de la lecture de la d[ite] pièce. Le Commissaire général au
Bureau de la Maison du Roi ayant le Département des Menus, ou son
représentant, assisteront aux lectures le plus souvent qu'il leur sera possible, et
surtout à celles des pièces dont la réception est annullée par l'art. 1er du
présent arrêt, sans néanmoins que leur absence puisse arrêter ou suspendre
les d[ites] lectures.
Art. 4. Pour que l'auteur connaisse le rang de la représentation de sa pièce, il
sera fait un tableau à trois colonnes, l'une des grandes comédies, l'autre
des tragédies et la troisième des petites pièces. La pièce reçue sera à l'instant
inscrite sur la colonne à laquelle elle doit apppartenir, pour être jouée à son
rang, sans distinction de saison d'hiver ou d'été, et ce rang ne sera pas
interrompu si ce n'est du consentement de l'auteur.
Art. 5. Toute réception et la date d'icelle sera constatée par la mention qui en
sera faite sur le manuscrit de l'auteur et sur un registre tenu à cet effet.
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Art. 6. Si l'auteur consent à céder son tour à un autre, ce qui ne pourra avoir
lieu qu'une seule fois, il sera tenu de prendre le rang de celui auquel il
aura cédé le sien; mais ce remplacement ne pourra se faire que par des pièces
du même genre, et même ne pourra avoir lieu, s'il se trouve d'autres pièces
reçues antérieurement dont le sujet soit le même que celui de la pièce qui sortirait
de son rang.
Art. 7. La distribution des Rôles et même le choix des doubles, au défaut
des acteurs en chef, appartiendront à l'auteur seul ou à celui qui aura présenté
la pièce en son nom à la Comédie et les acteurs originairement chargés des
Rôles ne pourront les faire passer à leurs doubles que du consentement de
l'auteur ou de son représentant, à moins qu'ils ne soient absents; ne pourront
néanmois les Auteurs obliger les Comédiens à se charger d'autres Rôles
que ceux de leur genre et emploi ordinaire.
Art. 8. Aucun Comédien ni Comédienne ne pourra, sans des raisons valables,
dont la connoissance appartiendra aux premiers Gentilshommes de la chambre
de Sa Majesté, refuser un Rôle de son emploi que l'auteur lui aura
destiné, à peine de cent livres d'amende pour la premiere fois, et d’être privé
en cas de recidive, de sa part dans la représentation de la pièce ou il aura
refusé de jouer.
Art. 9. Les Comédiens ne pourront, si non pour des causes graves dont la
connoissance sera réservée aux prémiers Gentilshommes de la chambre de Sa
Majesté, refuser de jouer, à son tour, une pièce ni en retarder les
représentations, sans le consentement de l'auteur; et si la représentation était
retardée par la faute de quelqu'un des Comédiens, il payera trois cents
livres d'amende applicable aux pauvres parmi lesquels seront préférés
Chapter 1 Page 4les anciens gagistes ou ouvriers de la Comédie.
Art. 10. Auront les Auteurs droit de donner des Billets chaque jour de
représentation de leurs pièces, tant qu'ils y prendront part, savoir: à
six personnes à l'Amphithéâtre pour les pièces en 5. et 4. actes, à quatre
personnes pour les pièces en 3. actes, et à deux personnes pour celles en
un et deux actes, sur lesquelles places l'auteur pourra en désigner une au
Parquet, l'excédent, si l'auteur en demande, sera par lui payé, ainsi que tous
les billets de parterre, s'il en demande aussi, mais il ne pourra lui en
être délivré plus de vingt et seulement aux trois prémieres représentations.
Art. 11. Sa Majesté a fixé et arrêté à deux mille trois cent livres pour
les représentations d’hiver et à dix huit cent livres pour les représentations
d’été, les sommes au dessous desquelles les pièces seront tombées dans les
régles et appartiendront à la Comédie. Veut et entend Sa Majesté que la
totalité de la recette, sans aucune déduction de frais, entre dans le calcul
des d[ites] sommes de deux mille trois cent livres et de dix huit cent livres, de
manière que l'on y comprenne non seulement la recette de la porte et le
produit des loges louées par représentation, mais encore le produit des
loges louées à l'année, suivant le prix des Baux ramené au produit
journalier, en le divisant par le nombre des représentations de chaque
année, le produit des abonnements à vie évalué sur le pied de l'intérêt à
dix pour cent, et généralement toutes les parties quelconques de la
recette entière du spectacle, dans quelque forme et sous quelque denomination
qu'elle se fasse ou puisse se faire à l’avenir.
Art. 12. Sa Majesté a également fixé et réglé les parts d'auteur à raison
de cent quarante deux livres seize sols sur mille livres pour les pièces
en 5. ou en 4. actes, de cent sept livres deux sols sur mille livres pour
Chapter 1 Page 5les pièces en 3. actes, et de soixante et onze livres huit sols sur mille
livres pour les pièces en un ou deux actes. Entend Sa Majesté que
les dites parts soyent prises sur la totalité de la recette du spectacle telle
qu’elle est expliquée par le précedent art., sous les déductions du quart
des pauvres et de la somme de six cent livres pour les frais ordinaires
et journaliers, conformément à l'accord signé par les Comédiens le
onze mars d[erni]er, approuvé par les premiers Gentilshommes de la chambre
de Sa Majesté le trente et un du même mois et signé par les Auteurs
le sept mai suivant, duquel accord copie demeurera annexée à la minutte
du présent arrêt, Sa Majesté l’ayant approuvé et confirmé, l’approuvant
et confirmant en ce qui n'est point contraire à la présente fixation des
parts d’auteur. Fait au surplus Sa Majesté très expresses inhibitions
et déffenses, tant aux Auteurs qu’aux Comédiens de traitter des pièces
à forfait, Sa Majesté déclarant dès à présent tous pareils traités qui
pourraient être faits à l'avenir, nuls et de nul effet, et voulant qu'il
soit loisible, soit aux Auteurs, soit aux Comédiens de révoquer les
consentements qu'ils pourraient y avoir donnés, et de s'en tenir aux
parts fixées par le présent article.
Art. 13. Les fixations faites par les deux précédents articles pour la
chute dans les régles et pour les parts d'auteur seront exécutées à
compter du jour du présent arrêt, tant pour les pièces qui n'ont point
encore été jouées, que pour celles qui, l'ayant été, et qui n'étant point
encore tombées dans les anciennes règles, se trouveront dans le cas d'être
reprises; sans néanmoins que les auteurs des d[ites] pièces reprises puissent
prétendre, pour les représentations antérieures à la datte du présent arrêt,
d'autres parts que celles des 9e, 12e, et 18e qui ont eu lieu jusqu'à présent.
Art. 14. Tout auteur pourra faire imprimer sa pièce sans perdre son
Chapter 1 Page 6rang de représentation, si les Comédiens ont passé sans la jouer deux
ans à compter de la date de la réception. Dans tout autre cas, les
Comédiens auront le droit de ne pas jouer la pièce imprimée prématurement.
Art. 15. Toute distinction entre ce qu'on appelle grands et petits jours
cessera provisoirement d'avoir lieu. Veut Sa Majesté qu’à l’avenir les
bons ouvrages, tragiques ou comiques, anciens et modernes, d’auteurs qui
partagent ou de ceux qui ne partagent plus, soyent joués tour à tour sans
distinction de jour, de façon que la Tragédie jouée le Mercredi le soit le sur-
lendemain et ainsi de suite. Entend Sa Majesté que cet arrangement
provisoire commencera de s'établir au moins pendant trois mois consécutifs
par une suite de bonnes pièces anciennes, tant comiques, que tragiques,
avant que l'on puisse y soumettre les nouveautés.
Art. 16. Tous les articles des anciens arrêts et règlements concernant la
Comédie aux quels il n'est point dérogé par le présent arrêt, auront leur
exécution comme par le passé, à l'exception néanmoins des arrêts du dix
sept mars et du douze mai derniers et des règlements y annexés que par
autre arrêt de ce jour Sa Majesté a révoqués et déclarés comme non avenus.
Mande et ordonne Sa Majesté aux premiers Gentilshommes de sa
chambre, au Commissaire Général au Bureau de la Maison du Roi
ayant le département des Menus, ou son représentant, de tenir la main,
chacun en droit soi, à l'exécution du présent arrêt, que Sa Majesté
veut être exécuté suivant sa forme et teneur nonobstant toutes oppositions
ou empêchements quelconques pour lesquels ne sera différé, et dont si aucuns
interviennent, Sa Majeste s'en réserve à soi et à son Conseil la
connaissance, icelle interdisant à toutes ses cours et autres Juges. Fait au
Conseil d'État du Roi Sa Majesté y étant tenu à Versailles le neuf décembre
mil sept cent quatre vingt.
Amelot
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Extrait des Registres du Conseil d'État du Roy. LE ROI Étant informé qu’il s’est glissé beaucoup d’abus et de
desordre dans la police interieure de la Comédie française; que le nombre trop
considerable des personnes qui ont droit de délibérer dans les assemblées y
cause presque toujours de la confusion et entraine une perte de temps nuisible
au service public et aux Comédiens eux-mêmes; que pour y remedier les
premiers Gentilshommes de la chambre de Sa Majesté avaient par un Réglement
du premier juillet mil sept cent soixante six confié à un Comité l’administration
de la Comédie; que cette premiere précaution et d’autres plus étendues que Sa
Majesté avait prescrites, tant par deux arrêts de Son Conseil le dix sept mars
et douze mai derniers, que par des Réglements y annexés, n’ont point eu jusqu’à présent
le succès qu’on devait s’en promettre; mais que pour rendre l’etablissement d’un
Comité propre à prévenir tous les inconvenients qui existent et avantageux aux
Comédiens eux-mêmes, il ne s’agit que de lui donner une nouvelle consistance, et
de déterminer les differents objets dont il sera autorisé à s’occuper. A quoi
voulant pourvoir: Oui le Rapport, Le Roi Etant en Son Conseil
a ordonné et ordonne que la Societé de la Comédie française sera regie et
administrée dans son interieur par un Comité permanent qui sera composé
de six Comédiens, deux Comédiennes et un Secrétaire ayant poids
déliberative, veut Sa Majesté qu’à ce Comité seul appartienne le droit de
faire les repertoires de quinzaine, de regler le temps ou les pièces devront être
mises à l’étude, d’entendre la lecture des pièces nouvelles et de les recevoir,
s’il y a lieu; d’entendre le rapport des Semainiers relativement à la police
de la Societé et de prononcer sur leur rapport cequ’il appartiendra, de
juger et reprimer tout cequi pourrait être contraire au bon ordre, et d’infliger
relativement à tout ceque dessus les amendes que le d[it] Comité jugera
nécessaires; d’examiner les sujets qui se présenteront, de s’informer de leur
conduite, de donner son avis aux Superieurs qui prononceront définitivement
Chapter 1 Page 8sur leur renvoi ou admission; de compter avec les Auteurs de leurs parts dans
le produit des représentations et de chercher a concilier les difficultés, s’il
s’en éleve, au sujet des comptes; de donner chaque année, huit jours avant
la closure du Théatre, son avis sur la distribution des fonds du Sequestre dont
il présentera un Rolle aux Superieurs pour être par eux approuvé ou
reformé, s’il y a lieu; de faire les marchés, d’arrêter les comptes, de
veriffier la Caisse, d’ordonner les dépenses journalieres ordinaires et
extraordinaires; d’inspecter, regler et ordonner dans toutes les parties dépendantes
du spectacle; de juger les differents qui pourraient survenir entre les
Comédiens, ainsi que les contestations des Directeurs et Acteurs de Province; de
Notifier, soit aux Comédiens, soit aux autres personnes interessées les ordres
qui leur seront adressés par les Superieurs; de nommer chaque année ceux
qui seront chargés des Compliments de cloture et de rentrée, et de veiller
à ce que les dits compliments ne renferment rien que de convenable; en un
mot de régler toutes les affaires de la Comédie générales ou particulieres
de quelque nature qu’elles soyent, l’intention de Sa Majesté étant que le dit
Comité, assisté des Conseils ordinaires de la Comédie, soit desormais le
Représentant et le gérant de la d[ite] Societé, excepté le seul cas ou il s’agissait
d'aliener les immeubles ou de les engager par des emprunts, ce qui ne
pourra être proposé que dans une assemblée générale, Permet néanmoins Sa
Majesté au dit Comité d’assembler toute la Societé quand il le jugera
utile et convenable, après d’en avoir demandé l’agrement aux Superieurs,
auquel cas les Délibérations seront prises en la dite assemblée générale en la
manière accotumée et à la pluralité des voix; Comme aussi veut Sa Majesté
que l’assemblée générale des lundis de chaque semaine pour le repertoire
continue d’avoir lieu, mais seulement pour y être notifié à tous les membres
de la Societé et à chacun d’eux le repertoire de quinzaine et les Déliberations
qui auront pu être prises par le Comité; auxquels repertoire et Délibérations
chacun des Membres de la Societé sera tenu de se conformer sous
peine de trois cent livres d’amende qui sera encourue par le seul fait.
Chapter 1 Page 9Autorise Sa Majesté les premiers Gentilshommes de Sa Chambre à nommer les
Sujets qui composeront le Comité et à les changer quand ils le jugeront
à propos, même à faire tels Reglements qu’ils croiront convenables et à donner
leurs Décisions sur les difficultés qui pourraient s’élever à l’occasion des dits
Réglements, ou du présent arrêt, auxquels Reglements et Décisions les
Comédiens seront tenus de se conformer sous peine de désobeissance. Mande et
ordonne Sa Majesté aux premiers Gentilshommes de Sa Chambre, au Commissaire
général au Bureau de la Maison du Roi ayant le département des Menus,
ou son représentant, de tenir la main, chacun en droit soi, à l’exécution du
prèsent arrêt, Sa Majesté revoquant au surplus et déclarant comme non
avenus les arrêts de son Conseil des dix sept mars et douze mai derniers,
et les Réglements y annexés. Fait au Conseil d’État du Roi, Sa Majesté
y Etant, tenu à Versailles le neuf Décembre mil sept cent quatre vingt.
AmelotTranscription by: Luis Sundkvist (with the help of a partial
transcription by Gregory S. Brown)